mardi 15 novembre 2016

UN APERCU DE LA VIE DE SERIGNE TOUBA : 1853 - 1927

1853 : Naissance de Cheikh Ahmadou BAMBA à Mbacké Baol.

1884 : Cheikh Ahmadou BAMBA fonde son premier village non loin de Mbacké Darou Salam où naîtront Serigne Mouhammadou Moustapha MBACKE et Serigne Fallou MBACKE ses premiers héritiers.

1886 : Cheikh Ahmadou BAMBA fonde le village de Darou Marnane non loin de Darou Salam.

1888 : Rapport de l'administrateur LECLERC au directeur des affaires politiques sur les "Prétendus agissements de Cheikh Ahmadou" alors que le fondateur du Mouridisme dont la renommée grandissante venait aussi de fonder une capitale : TOUBA avec l'établissement de Darou Khoudoss.

1889 : Inquiétudes des autorités françaises devant l'influence croissante de Cheikh Ahmadou BAMBA.

Mars 1895 : Cheikh Ahmadou BAMBA a presque 40 ans lorsqu'il quitte Touba pour fonder Mbacké Bary dénommé Touba Djoloff. Il venait de signer le pacte conduisant aux épreuves qui allaient suivre.

10 août 1895 : Cheikh Ahmadou BAMBA qui venait de quitter Mbacké Bary rencontre à Djéwol le détachement de 120 soldats venus l'arrêter.

5 septembre 1895 : Cheikh Ahmadou BAMBA interné à Saint Louis est convoqué au palais du gouverneur. La réunion du conseil privé décide de l'exiler par PV N°1 délibération N° 16.

21 septembre 1895 :Cheikh Ahmadou BAMBA quitte le Sénégal pour le Gabon par Dakar.

Avril 1902 : François Carpot est élu député du Sénégal.

11 novembre 1902 : Retour de Cheikkh Ahmadou BAMBA au Sénégal.

Février 1903 : La renommée du Chef religieux revenu d'exil prend de nouvelles proportions. Inquiétudes des autorités coloniales.

Mai 1903 : Refus en ces termes de Cheikh Ahmadou BAMBA de répondre à une convocation du gouvernement à Saint Louis. "Je suis le captif de DIEU et ne reconnais d'autre autorité que lui...."

Juin 1903 : Opération de 150 soldats sur Mbacké

14 juin 1903 : Cheikh Ahmadou BAMBA est envoyé en résidence obligatoire à Saout El Mah en Mauritanie auprès de Cheikh Sidya BABA.

Avril 1907 : Retour au Sénégal avec cette fois résidence obligatoire à Thièyenne (cercle de Louga) où malgré l'enclavement comme en Mauritanie, continuent d'affluer les multiples talibés et de nombreux savants.

lundi 7 novembre 2016

Allah et son Prophète sont fiers de Serigne Touba ( par Mouhammadou Moustapha Diop)

Serigne Touba a rendu son dernier soupir en 1927, son trépas a certes mis fin à son existence terrestre; mais les liens indéfectibles qui, par- delà le temps et l'espace nous rattachant à lui, ne seront jamais rompus. Ainsi en va t-il de la diffusion massive de toute une littérature dévote dédiée aux mérites de Serigne Touba faisant de lui, l'instrument de la miséricorde divine. Son amour nous habite. Nous y puisons la force d'espérer, contre vents et marées. Et plus la tempête fait rage, plus notre notre ferveur sur lui augmente. Nous continueons toujours à nous consoler des jeureujeufé khadimou Rassoul (Merci Khadim Rasoul) !

Pourquoi tant d'amour parce que c'est lui "khayra al khadim", " le meilleur des serviteurs". Pourquoi tant d'amour, parce que c'est lui dont le cœur n' a eu aucun occupant si ce n'est Dieu et son Prophète. C'est lui qui a osé affirmer l'unicité de Dieu partout sans jamais en départir de celle-ci. C'est lui qui a osé lancer l'offensive contre le Diable avec comme bouclier la crainte révérencielle, en portant le casque de la foi tout en ayant à la main l'épée de l'unicité divine et les flèches de l'exaucement de l'imploration dans son étui. C'est lui qui a arpenté les endroits les plus effrayants en affirmant sans détour l'unicité de Dieu. N'a-t-il pas vaincu ses ennemis en affirmant toujours Dieu est unique et le Prophète est son Messager? Il a aimé Dieu d'un amour sincère. C'est pourquoi il s'est soustrait du bas monde, des plaisirs, des désirs , de l'âme charnelle, de la passion et des démons. Il a aimé le Prophète d'un amour sincère. C'est pourquoi il s'est conformé à lui, résolument et humblement. Qu'il est sublime Serigne Touba !

Œuvrant sans relâche, de jour comme de nuit, ne se réjouissant ni du bas monde, ni des trésors, ni des biens, ni des plaisir, ainsi Dieu l'a soustrait du mal et du vice tout en soummettant la réussite sous son service. C'est en cela qu'il a arraché les créatures des mains du Diable pour les emmener à la porte de Dieu. Comment pourrait-il être autrement puisque tu es l'instrument de la miséricorde divine.
Merci Serigne Touba !

vendredi 4 novembre 2016

UNIVERSALITÉ DU MESSAGE DE CHEIKH AHMADOU BAMBA [Par Professeur Souleymane Bachir Diagne]

UNIVERSALITÉ DU MESSAGE DE CHEIKH AHMADOU BAMBA [Par Professeur Souleymane Bachir Diagne, Philosophe, Columbia University]
Exposé présenté au Siège de l’Organisation des Nations Unies (ONU), à l’occasion de la célébration du Cheikh A. Bamba Day 2011.


« (…) Sujet ne pouvait être plus approprié pour magnifier une figure de la dimension de Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké et la voie qu’il appela Mouridiya, un ordre soufi né dans un contexte de domination coloniale à qui il opposa, avec succès, le pouvoir de la non-violence. Célébrer un homme qui, dans une admirable dévotion et un amour infini pour le Prophète de l'Islam, n’aspirait qu’à un titre, celui d’être le serviteur du Prophète (Khâdimu Rassoul), ne consiste pas seulement à se souvenir d'une vie et d’une œuvre importantes pour l'histoire de l'Islam au Sénégal, en Afrique et dans le monde. Cela signifie aussi et surtout méditer sur ses enseignements, prendre pleinement conscience de leur actualité et y trouver un viatique pour aujourd'hui et demain. C’est-à-dire à notre époque et dans le contexte de la mondialisation. (…)
Dans le monde de l'islam, ce genre d'éducation, cet enseignement de la non-violence est surtout associé à la tradition soufie établie par de grands maîtres. L’un des plus éminents d’entre ces maîtres est Cheikh Ahmadou Bamba dont la vie et l’œuvre, que nous célébrons ici, constituent une parfaite illustration, dans notre époque, de la valeur du message à la fois éternel et continuellement adaptable de la dimension intérieure de l'Islam que nous appelons Soufisme.
Une analyse, même sommaire, des écrits du Cheikh prouve largement que ceux-ci exhalent le souffle du Soufisme. A ce titre, les chercheurs mettent en général l'accent sur l'un de ses premiers écrits, Les Itinéraires du Paradis, traduit en anglais par Abdoul Aziz Mbacké, sous le titre Ways unto Heaven (Masâlikul Jinân). Nous savons, à travers son introduction, que cet ouvrage fut versifié entre 1883 et 1887 par Cheikh Ahmadou Bamba qui était alors âgé d’une trentaine d’années, juste après le décès de son père, et qu’il est principalement basé sur un traité en prose sur le Soufisme, écrit par Al Yadâlî, intitulé Le Sceau du Soufisme (Khâtimatu-t-tasawwuf). Afin d’appréhender pleinement à quel point Les Itinéraires du Paradis symbolise l'enseignement de Cheikh Ahmadou Bamba, l’on pourra citer la fin de l’introduction où son traducteur nous apprend que: «... des livres comme Masalik nous fournissent les clés essentielles pour pénétrer le royaume du message universel et intemporel [de Cheikh A. Bamba]. " (A. A. Mbacké, Jihad for Peace, exploring the Philosophy of Sheikh Ahmadou Bamba, Majalis, 2011).
Si l’on considère le message de tolérance et d'adoption de la différence qui fonde le Soufisme, nous nous devons d’insister sur le fait que le Soufisme ne constitue nullement une secte parmi les autres « sectes » de l’Islam. En effet, nous rencontrons souvent une présentation assez simpliste du Soufisme comme étant la secte des « bons » s’opposant à celle dite des « méchants » ou quelque chose de ce genre. Au contraire, affirmer que le Soufisme représente la dimension intérieure de l'Islam équivaut à dire qu’il n’est rien d’autre que l'Islam lui-même. C'est pourquoi Abul Hassan Ali Hujwiri (vivant au 11ème siècle) fit une réponse restée célèbre, lorsqu'il lui fut demandé de définir le Soufisme, à savoir que « aujourd'hui le Tasawwuf est un nom sans réalité, alors qu'auparavant il était une réalité sans nom ». Dans la même veine, l’on verra que Cheikh Ahmadou Bamba a tout simplement assimilé le Soufisme à l'islam. Car, en se référant une fois de plus à la réflexion majeure de Abdoul Aziz Mbacké sur la pensée de Khâdimu Rasul, tel qu’il aimait lui-même se faire appeler, l’on peut évoquer les réponses que le Cheikh fit au gouverneur général français l’interrogeant sur les origines de la confrérie Mouride.
A sa première question portant sur «le fondateur initial de l'ordre Mouride », il est rapporté (A. A. Mbacké, op cit p.66) que le Cheikh répondit que celui-ci avait trois fondateurs qui étaient : Imân, c'est-à-dire la foi en Dieu ; Islam, en d'autres termes les cinq piliers des pratiques cultuelles musulmanes ; et le troisième Ihsan, c'est-à-dire la perfection spirituelle, ainsi définie: « Adorer Dieu comme si tu Le voyais, car si tu ne Le vois pas, Lui te voit. ». Ceci constituant, on le perçoit, une manifeste référence au célèbre hadith dans lequel le Prophète Muhammad (PSL) expliquait à ses disciples le caractère étroitement imbriqué (et finalement unifié) de ces trois dimensions de leur religion.
Cette clairvoyante réponse du Cheikh porte en elle une signification profonde. Elle symbolise en effet le refus d’isoler le Soufisme et de le dissocier du réel et original sens de l'islam, qui repose essentiellement sur le pacte entre le Créateur et Sa créature. Ce pacte primordial qui fut établi lorsque, à l’interrogation de Dieu: «Ne suis-Je pas votre Seigneur? », les âmes humaines répondirent à l'unisson « Certes, oui ! » [Quand ton Seigneur tira des enfants d'Adam, de leurs reins, leurs descendants, et les fit témoigner sur eux-mêmes, «Ne suis-Je pas votre Seigneur? » Ils dirent:« Certes, oui ! Nous le témoignons! ». Ceci afin que vous ne puissiez dire au Jour du Jugement : « Nous n’en n'avions pas connaissance. » ou plutôt « Nos aïeuls avaient adoré de faux dieux, et nous ne sommes que leurs descendants. Vas-Tu nous punir pour des actes commis par la faute d’hommes insensés ? » (Al A’raf, v. 172-173)
Ce passage, souvent cité dans la littérature soufie, évoque ce moment intemporel où Dieu convoqua devant Lui toutes les âmes qui allaient vivre sur terre et leur demanda de témoigner qu'Il est, en vérité, le Vrai Pourvoyeur à qui elles devaient leur être et leur existence même. Leur véritable identité (qui elles sont réellement) est ainsi définie à partir de cet instant hors du temps, pour l’éternité, lorsqu’elles répondirent avec entrain «Oui !» à leur Créateur et Pourvoyeur, en se soumettant à Lui (souvenons-nous que le mot «islam» signifie «se soumettre paisiblement au Bien-Aimé »). Lorsque ces âmes pénétrèrent dans le champ du Temps et commencèrent à vivre dans ce monde, en tant que simples êtres humains, elles oublièrent cette rencontre primordiale, bien que leur véritable nature en soit restée empreinte à jamais. Raison pour laquelle elles sont toujours animées du désir d'entreprendre le Voyage de retour, à travers le souvenir (ou « dhikr », signifiant mention et évocation de Dieu), vers ce moment-là, vers leur vraie nature : le «Oui» par lequel elles avaient exprimé leur consentement à leur Créateur, le jour où Il leur demanda: «Ne Suis-je pas votre Seigneur? »
On trouve ici l'affirmation d'une nature primordiale (fitra) de l'homme qui reconnaît l'unicité de Dieu (symbolisée par la formule « il n'existe aucune divinité en dehors de Dieu ») et qui pose le principe de la responsabilité de chacun devant son Créateur. Ce qui, en d’autres termes, signifie qu’il ne saurait y avoir d’excuse à l'ignorance basée sur celle de nos ancêtres.
L'esprit même du Soufisme peut ainsi être résumé : le Pacte conclu entre Dieu et l'homme signifie que Dieu est le but ultime du désir de Sa créature. La conséquence à tirer de cet esprit est l'idée que beaucoup de chemins mènent à la même vérité. Principe s’avérant conforme aux fondements mêmes de l'enseignement de Cheikh Ahmadou Bamba : l'insistance sur le fait que la prolifération des ordres soufis, en dépit de l'unicité de leur objectif, provient seulement de différences qui sont de loin négligeables rapportées à l'unicité de la force motrice qui les sous-tend toutes, c’est-à-dire l'Amour. En fait, ces différences constituent une bénédiction pour la communauté. Ceci constitue le solide fondement sur lequel repose son refus de la division et du sectarisme. Cette conviction se perçoit mieux à travers le fait que sa voie spirituelle ne porte pas son propre nom, comme il est de coutume dans les ordres soufis, mais porte la dénomination générale de « Mouridiya ».
L'attitude évoquée dans ces versets, la compréhension et l'amour pour les différentes manifestations de la même Vérité qui y sont exprimées constituent le Soufisme. La tolérance n’en est pas juste un additif, un accident. Il fait partie intégrante de la nature même du Soufisme de reconnaître que tout être créé est, dans son essence même, un mouvement vers Dieu et d’admettre la présence de ce mouvement dans toutes les créatures vivantes.
C'est la raison pour laquelle, même aux temps de l'oppression et de la domination coloniale où il vivait, le Cheikh n’eut recours à nulle forme de résistance autre que la non-violence et une attitude qui exprime le vrai sens du djihad : la lutte personnelle pour surmonter sa propre obscurité et pour se transformer en cette lumière que nous sommes appelés à devenir, en conformité avec cette prière coranique : « O notre Seigneur, parfais notre lumière pour nous, et accorde nous le pardon. Car Tu détiens le pouvoir sur toutes choses.» (Tahrim, v. 8).
Le Cheikh nous apprend par là que c’est grâce à un ce travail non-violent sur soi, à cette action de transformation de l’obscurité de l'âme inférieure (nafs) en lumière de l'esprit (rûh) que nous parvenons à une vie hors de portée de l'oppression, hors d’atteinte de la violence, au-dessus de la division et de la discorde, au-delà de la destruction et de la mort. Je pense qu’une telle vision se manifesta avec une rare éloquence à travers la célèbre entame d'un poème dans lequel il insiste sur le fait que, en dépit des apparences, il était à l'abri de l'oppression de ses bourreaux, en demeurant dans le monde de la paix et de la lumière et non dans celui de la violence et de l'obscurité : «Au moment où je marchais, je me trouvais en réalité en compagnie des Vertueux / Alors que mes ennemis croyaient que je marchais, comme prisonnier, dans la sphère [qu’ils dominaient]» (Asîru ma'al Abrar ...)
La question suivante pourrait alors être soulevée : cette attitude est-elle due à un certain esprit d’évasion ou mysticisme rêveur à travers lequel l’on parvient tout simplement à ignorer ce monde et ses vicissitudes, sa violence, ses inégalités, ses injustices, pour s’orienter vers un autre monde ? Le poète et philosophe indien Allama Muhammad Iqbal cite à ce propos le maître soufi Abdul Quddus de Gangah qui avait affirmé : « Muhammad d'Arabie est monté vers le ciel le plus élevé et retourna (sur terre). Je jure par Dieu que si j'avais atteint ce point, je ne serais jamais retourné. » (Reconstruction de la Pensée Religieuse de l'Islam, « L'Esprit de la Culture Musulmane »). Iqbal, en commentant cette déclaration, expliqua : «Pour le mystique, le repos obtenu dans l’ « expérience unitaire » constitue une fin en soi. Pour le prophète, il représente l'éveil en lui-même des forces psychologiques qui font bouger l’univers, forces projetées pour transformer complètement le monde des humains. Le désir de voir son expérience religieuse transformée en une force vive pour le monde l’emporte chez le prophète. » En fait, la question ici n'est pas tant celle de la distinction entre le mystique et le prophète que celle de la compréhension de la notion de responsabilité. Le Prophète (PSL) avait la responsabilité de revenir de cette expérience unitaire, connue sous le nom de Mi'raj (Ascension Nocturne), afin d'éduquer l'humanité et de transformer le monde, en conformité avec le message qui lui avait été confié.
Le mystique accompli a également cette même vocation de traduire sa vision en une force de transformation. Et, assurément, Cheikh Ahmadou Bamba était un de ces mystiques accomplis. «Demeurer en compagnie des Vertueux» n'était certainement pas son but ultime. Il sentit qu'il avait une responsabilité envers l'humanité, qu'il se devait de nous éduquer, pour nous extirper des ténèbres vers la lumière des connaissances, vers le culte véritable et l'action pour transformer notre condition, par des moyens pacifiques, afin de substituer l'émancipation à l'oppression, la justice à l'inégalité, le développement à la pauvreté. C’est cela qui explique l'importance bien connue qu’il accorde au travail et à l'éducation, qui constituent les moyens de transformer notre condition...»

mardi 1 novembre 2016

Appel Grand Magal de TOUBA 2016 par le Khalife Général des Mourides. Regardez!


Les sens du Magal de Touba par S. Moustapha Saliou Mbacké. Ecoutez!

Le sens profond du Magal de Touba expliqué par Serigne Moustapha Saliou Mbacké. Une vidéo riche en enseignement sur la signification ésotérique du Magal. Ecoutez!



Le Grand Magal de Touba dans toutes ses Dimensions (par S. Cheikh Fatma Mbacke ibn Serigne Moustapha Bassirou)

Un Petit Rappel Historique

Le samedi 18 Safar 1313, ( le 10 août 1895) à 14h, Le Cheikh Ahmadou Bamba est arrêté à Djéwal (actuelle région de Louga) par un détachement des autorités coloniales françaises.  Il est  exilé après un procès inéquitable, tenu dans la salle de délibération du Conseil  Privé, sis dans la Gouvernance de Saint-Louis le 05 septembre. A l’issue de ce jugement sans appel, le Conseil Privé décida « à l’unanimité, après avoir entendu les rapports de M. MERLIN et LECLERC, et fait comparaître Ahmadou Bamba, qu’il y avait lieu de l’exiler au Gabon ». A quelle fin ? « Jusqu’à ce que » disait-il « l’agitation causée par ses enseignements soit oubliée au Sénégal ». (Sources : rapport du Conseil Privé, août 1895).
L’exil au Gabon durera  SEPT longues années.

C’est cette date du 18 Safar que Khadimou Rassol  a  choisie  comme jour d’actions de grâce et de fête.
Rares, sont ceux qui ont choisi le jour où toutes leurs épreuves et privations ont commencé pour célébrer une fête et remercier le TOUT PUISSANT.

Selon Cheikh Abdoul  Ahad Mbacke (3è Khalif des Mourides), c’est en 1921 à Diourbel que le Cheikh lança son célèbre appel:
« Quant au Bienfait que DIEU m’a accordé, ma seule et souveraine Gratitude ne le couvre plus, par conséquent j’invite toute personne qui  se réjouit de  mon bonheur personnel, à  s’unir à moi dans la reconnaissance éternelle  à DIEU, chaque fois que l’anniversaire de ce jour la  trouve sur terre ».

 En 1980, Cheikh Abdoul  Ahad  dans son  appel pour le Grand  Magal, cite les écrits du Cheikh pour étaler l’étendue des  bienfaits reçus de Dieu :
 « DIEU m’a accordé des dons prodigieux qu’il n’a jamais accordés et qu’il n’accordera jamais à un contingent. »
« Je ne doute guère de ma qualité de voisin intime du CREATEUR DE L’UNIVERS ;  quel magnifique état ! »
« Les faveurs  extraordinaires, innombrables  que j’ai obtenues  de DIEU ne se comptent plus dans l’univers et c’est cela, mon bonheur. »

Chacun selon ses moyens ( de la poule au chameau) est invité à célébrer ce jour 18 Safar chaque fois qu’il  en  a l’occasion. C’est une forte recommandation de Cheikh Ahmadou Bamba que tous les Khalifs rappellent  à la veille du Magal.
Sur la signification du mot « Magal », Cheikh Saliou Mbacké 5ème khalif de  Sérigne  Touba,
à  l’occasion de son appel du 25 août 1990, nous  édifie clairement. Il affirme en substance Que la Fête du sacrifice étant une Tradition Prophétique, l’appellation "deuxième fête du sacrifice" que les talibés avaient adopté ressemblerait donc à une innovation blâmable (« Bidaa »). C’est pourquoi  le Cheikh  recommanda de l’appeler "MAGAL" (MAGAL : Terme Wolof qui signifie ici célébrer, évidemment dans l’exaltation de la Grandeur du SEIGNEUR et l’Election du Prophète. C’est autrement dit glorifier le SEIGNEUR et Son PROPHETE) ; Donc  que personne ne l’appelle plus  "deuxième Fête du Sacrifice" mais  « Magal »  C’est le Cheikh qui est le premier à prononcer ce mot que nous  nous  employons tous  aujourd’hui.

Le Magal était  célébré individuellement par chaque talibé chez lui comme la Tabaski. Cela a été ainsi du temps du Cheikh et  pendant le règne du premier Khalif Cheikh Mouhamadou Moustapha  (1927 - 1945).  On peut penser que le premier Khalif n’a pas appelé à la célébration du Magal à Touba, peut être uniquement parce que la majeure partie de son Khilafat a coïncidé  avec la crise des années trente ainsi que la seconde guerre mondiale; Il était en outre préoccupé, par  le plus important projet mouride : la grande Mosquée de Touba, qui nécessitait le prolongement du chemin de fer de Diourbel à Touba. Sérigne Mouhamadou Moustapha réalisa le tronçon Diourbel- Touba sur fonds propres  et facilita  le transport des matériaux de construction.
   Il choisit  le 20 du mois lunaire mouharram qui marque le retour à Dieu du Cheikh  pour le grand  rassemblement annuel  des mourides.

C’est le deuxième Khalif des mourides Cheikh Mouhamadoul Fadel Mbacke qui appela tous les fidèles mourides à venir à Touba pour célébrer le Grand Magal en 1948. Le Grand rassemblement à Touba a permis au deuxième Khalif de profiter de ce jour d’actions de grâce pour mobiliser et motiver annuellement les talibés pour l’achèvement du Grand Projet de la communauté, la Grande Mosquée de Touba.  Le  khalif célébra avec faste  la prière d’inauguration de la Mosquée en 1963.

Comme on le voit le Magal a revêtu depuis le début plusieurs dimensions. Et aujourd’hui il serait prétentieux de vouloir lister « toutes les dimensions du Magal » comme semble le suggérer le titre de mon article. Mon but est donc d’en citer certaines importantes, mais ce Grand rassemblement n’a pas fini de nous réserver toujours et encore de nouvelles  facettes.

La Dimension Spirituelle

L’Objectif premier du Magal est spirituel. C’est donc cette dimension qui doit être mise en avant. Le Magal c’est rendre grâce à Dieu pour les Bienfaits immenses qu’Il a accordés à notre Cheikh par, d’abord la lecture du Coran, des Khassaids et  l’accomplissement de  toutes autres activités spirituelles conformes à la Tradition Prophétique (Sunna). Tous les khalifs  ont toujours insisté  sur  la lecture du Saint Coran avant et après le Magal. Cheikh Saliou recommandait aux talibés de lire trois(3) fois le Coran avant le jour J ou de le faire lire. Le nouveau Khalif, Cheikh Sidy Moukhtar Mbacke vient de renouveler cette recommandation.

Le Magal doit aussi être un jour d’introspection spirituel pour chaque mouride. Faire le point sur sa qualité de talibé du Cheikh El Khadim; s’interroger sur ce qui doit être le comportement d’un  bon mouride, sur  son engagement dans les recommandations du Cheikh;  sur ses actions en faveur de l’islam etc.…
La Dimension Festive

Comme le disait Cheikh Saliou Mbacke, le Magal c’est le « Berndèèl ».  La qualité et la quantité des aliments et collations etc.… doivent permettre à chacun de sentir que le Magal c’est la meilleure fête qui puisse exister.  Donner  à  manger est un acte fortement recommandé par l’Islam.
Sur ce plan  il faut  reconnaître que les talibés ont toujours fourni des efforts immenses pour rendre la fête belle. Dans  presque toutes les familles ainsi qu’au sein des Dahiras, des bœufs, moutons et mêmes des chameaux sont immolés pour l’occasion. Une quantité astronomique de boissons, de gâteaux et de toutes sortes de mets sont offertes aux musulmans à Touba durant le Magal. Certains talibés reviennent de Touba chargés de produits alimentaires qu’ils offrent comme « Barkèlu » aux gens qui n’ont pas pu se rendre au Magal.

La Dimension Sociale

Le Magal offre, à  beaucoup de familles l’occasion unique de  se  retrouver. C’est ainsi beaucoup de personnes profitent du Magal pour organiser leur  rencontre annuelle de famille. L’événement est donc un important facteur de renforcement  de liens familiaux pour des gens de plus en  plus dispersés dans le monde entier avec le phénomène de l’émigration.

C’est le lieu de magnifier ici le rôle important que le Magal joue dans le brassage ethnique entre les talibés. Si, contrairement à beaucoup d’autres pays africains, le Sénégal connaît très peu de conflits ethniques, c’est grâce également à de tels évènements qui regroupent des millions de personnes d’ethnies, de races, de conditions sociales différentes pour un même but : rendre grâce à Dieu et célébrer l’œuvre de Cheikh El Khadim. Sous cet angle, le Magal participe au renforcement de  la cohésion sociale du pays.
On peut aussi dire que la paix et l’harmonie entre les confréries islamiques du pays sont favorisées par l’événement. Beaucoup de mouride aiment à inviter leurs amis et collègues des autres confréries (Tidiane, Khadres, Layene etc…). Ces derniers leur rendent bien l’appareil lors des Gamous et autres manifestations religieuses.

La Dimension Culturelle

L’animation culturelle avant, pendant et après le Magal par des Conférences, débats, séminaires, chants religieux, etc.… à Touba, dans les médias, sur Internet…participe à l’éducation des talibés pour mieux s’imprégner des enseignements du Cheikh et à la diffusion du message universel de celui ci.
Dans ce domaine, il faut saluer les initiatives, depuis quelques années du comité d’organisation du Magal qui visent à créer des évènements pré-Magal de manière décentralisée à Dakar, Saint-Louis, Paris etc.… de même que l'excellent travail de Rawdu Rayahin sur les médias pendant la période du Magal et le jour même avec une rencontre débat entre tous les représentants de toutes les communautés musulmanes du Sénégal et d’autres pays.

La Dimension Economique

La dimension économique du Magal est l’une des plus évidentes. Même si certains esprits tentent d’avancer que pendant cet événement le reste du pays est paralysé.
C’est  méconnaître le rôle important que le Magal joue dans l’économie du Sénégal.
En effet pour certaines entreprises l’événement est même vital car  le Magal peut représenter jusqu’à 60% de leurs chiffres d’affaires annuels.

Pour les entreprises de construction et les ouvriers du bâtiment, le Magal est une vraie aubaine. Plusieurs semaines avant le jour J, il est quasi impossible de trouver des ouvriers si on veut faire des travaux dans sa maison à Touba. Certains doivent même en amener d’autres villes du pays. Le Magal est donc un créateur d’emplois formidables.

C’est le  secteur du Commerce qui, sans doute se taille la part du lion dans cette tentative d’analyse des retombées du Grand Magal. En effet pendant plusieurs semaines Touba se transforme en grand souk. Presque tout se vend comme de petits pains pour un marché immense de près de 4 millions de clients potentiels.

Beaucoup d’Industries du Sénégal connaissent   leur  meilleure période de vente pendant le Magal. Les usines pour la fabrication de nattes, d’ustensiles de cuisine, de glace, de matelas, d’eau minérale etc.…) ne parviennent pas en général à satisfaire la demande.

L’Agriculture, l’Elevage, l’Aviculture sont également très florissants avec le Magal. La consommation de couscous sénégalais, donc du mil est à son plus haut niveau. Les sociétés avicoles préparent des bandes de poussins chair  spécialement  pour le Magal tellement la demande est forte. Pour les éleveurs l’événement constitue leur période de traite. Les meilleures têtes de leurs troupeaux sont réservées à la vente à Touba car les mourides ont l’habitude d’acheter de gros bœufs  pour le Magal « Nagu Magal ».

Le secteur des Télécoms n’est pas en reste. Même en temps normal, Touba est la deuxième ville, après Dakar en termes de nombre de lignes téléphoniques et d’appels entrants ou sortants pour tous les opérateurs. Durant le Magal Touba devient numéro 1 au Sénégal et certainement en Afrique pour le nombre d’appels de ou vers la Ville Sainte.

Notons que le Magal constitue également un moment où se rencontrent beaucoup d’hommes d’affaires pour nouer des partenariats divers. Certainement de nouvelles entreprises naissent de ces rencontres d’affaires durant le Magal.

La Dimension internationale

C’est la période du Magal que choisissent en général les mourides de la diaspora pour venir au pays célébrer la fête et séjourner dans leurs familles.
C’est ainsi que, outre les vols réguliers vers le Sénégal, des vols spéciaux sont chaque année affrétés pour les besoins du Magal.  Dans les aéroports de Madrid, Rome, Paris, New York etc.…même les occidentaux qui ne connaissent rien du Magal sentent que quelque chose se passe quelque part en Afrique à cause du nombre inhabituel de monde qui embarque vers le Sénégal.
On raconte que les talibés commencent à célébrer le Magal dans le ciel avec les avions spéciaux qui les amènent vers le Sénégal par la lecture du Coran et la distribution de « Café Touba ».
Les compagnies aériennes en arrivent aujourd’hui à appliquer des tarifs promotionnels pour le Magal.

Des occidentaux, de plus en plus nombreux se retrouvent à Touba lors du Magal. Si certains ne viennent que par curiosité, d’autres par contre sont là par conviction religieuse et attachement aux enseignements du Cheikh Ahmadou Bamba. Ces « descendants » de ceux qui avaient prononcé le jugement de 1895 : « … qu’il y avait lieu de l’exiler au Gabon »,  « Jusqu’à ce que L’agitation causée par ses enseignements soit oubliée au Sénégal », eh bien, eux aussi ils participent à maintenir vivace « L’agitation causée par les enseignements du Cheikh ».

Il faut souligner que de mourides de l’extérieur qui ne peuvent pas venir à Touba célèbrent le Magal dans les nombreuses « Keur Serigne Touba » de leurs pays d’accueil, en compagnie de beaucoup de musulmans sénégalais d’autres confréries ou des musulmans d’autres nationalités.

Il faut aussi noter caractère international du Magal par la présence à Touba de nombreuses délégations de pays musulmans, représentés en général par leurs ambassadeurs. Certains pays frontaliers du Sénégal comme la Gambie et la Mauritanie sont représentés à la fois par des officiels et par des Oulémas. Nul doute que Le Magal constitue un évènement qui contribue au succès de la politique diplomatique du Sénégal.

Quelles perspectives pour le Magal ?

Dans l’avenir il faudra peut être  penser à mieux formaliser les retombées économiques du Magal sur la ville sainte de Touba.
Pourquoi ne pas développer des projets d’investissement avec des appels de fonds organisés lors du Magal ? Chaque visiteur donnerait volontairement, à l’entrée de la ville sainte par exemple une somme symbolique de 500 F. Sur une hypothèse de 3 millions de personnes, cela donnerait 1 500 000 000 F chaque année. Cette somme  pourrait être investie dans des projets identifiés à l’avance tels que la  réalisation de voirie à Touba, la construction  de centres culturels islamiques, une bibliothèque dans un quartier donné de la ville ou l’édification d’hôpitaux, de Daaras islamiques modernes, et même  la création d’une société de nettoiement dans la ville sainte ou la constitution d’un fonds  d’aide à l’informatisation des structures de la ville y compris un portail web officiel du Mouridisme. On peut aussi mobiliser une partie de ces fonds pour la création d’un Grand prix du Khalif général pour la création littéraire et culturelle islamique etc.…

Pour garantir le succès de  telles initiatives, la gestion de ces fonds provenant de ces contributions devrait être transparente et les projets réalisés devront  être concrets  et visibles. 
Nul doute que si ces conditions de bonne gouvernance sont réalisées la grande majorité des fidèles mourides seront tout heureux de participer à l’initiative en dépassant sûrement et largement le montant symbolique fixé.

Il est clair que  l’hébergement des hôtes va de plus en plus être difficile vu le nombre croissant des visiteurs. A l’image de ce qui se fait à la Mecque et à Médine, des privés pourraient bâtir des buildings et/ou hôtels pour les louer à certains hôtes durant le Magal.

Le comité d’organisation doit  être félicité pour l’heureuse initiative prise depuis deux ans d’organiser des conférences, symposiums, colloques etc.… à Dakar, Paris, Kaolack, Saint-Louis…avant le GRAND JOUR. Cette nouvelle politique de décentralisation devrait  également être mise en œuvre à Touba même avec des évènements culturels(conférences, débats, animations virtuelles etc.…) dans tous les quartiers de la Ville sainte.

La large  diffusion du Magal sur Internet doit aussi être une priorité dans l’avenir en insistant sur l’utilisation de l’Anglais comme langue de support de communication.

A l’image de ce que font aujourd’hui certaines sociétés, surtout les compagnies de telecom, l’image du Magal devrait être plus et mieux utiliser par des initiatives privées pour  promouvoir le développement de produits de merchandising sur le Magal et le Mouridisme (porte clé, stylos, représentation de la Mosquée, « petites boîtes à images de Touba» etc.…) comme cadeaux souvenir pour les  visiteurs mourides ou non

Conclusion

Il est difficile voire impossible de faire le tour des multiples dimensions du Magal de TOUBA, le deuxième grand rassemblement de l’islam après le pèlerinage à la Mecque.
Telle n’était point notre ambition. Notre objectif était de susciter des réflexions et des débats sur des aspects d’intérêt communs à tous et  qui pourraient être tirés du Grand Magal. Je vous invite donc à  cette entreprise car le Magal nous réserve encore des dimensions insoupçonnées.

Cheikh Fatma Mbacke,
Ingénieur informaticien,
Imam à la Mosquée de
Serigne Moustapha Bassirou Mbacke, Au Golf Nord Hamo

lundi 31 octobre 2016

Officiel: Le Magal de Touba édition 2016 sera célébré le samedi 19 novembre

Le Magal de Touba 18 Safar 1438H sera célébré le samedi 19 novembre 2016. 
Rappelons que le Magal commémore le départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba au Gabon après un procès inéquitable, tenu dans la salle de délibération du Conseil  Privé, sis dans la Gouvernance de Saint-Louis le 05 septembre 1895. A l’issue de ce jugement sans appel, le Conseil Privé décida « à l’unanimité, après avoir entendu les rapports de M. MERLIN et LECLERC, et fait comparaître Ahmadou Bamba, qu’il y avait lieu de l’exiler au Gabon ». A quelle fin ? « Jusqu’à ce que » disait-il « l’agitation causée par ses enseignements soit oubliée au Sénégal ». 

jeudi 20 octobre 2016

VIDEO > Le Sénégalais Moustapha Niang enlève le trophée du concours de lecture psalmodiée du Coran en Iran. Regardez!


La biographie de Cheikh Mouhamadou Moustapha Mbacké Al Karim(1888 - 1945)

Selon l’hagiographie mouride, le premier successeur de Cheikh Ahmadou Bamba naquit le 11 du mois de Muharram de l’an 1306 de l’Hégire, à Darou Salam, correspondant au 17 septembre 1888 de l’an romain. L’histoire rapporte qu’il fallut aller à la quête du Cheikh qui avait à cette époque l’habitude de s’absenter pendant assez longtemps dans la forêt avoisinante à la recherche du futur site de la ville de Touba. Les émissaires le trouvèrent finalement au troisième jour de la naissance de l’enfant de Sokhna Aminata Lô dans un lieu nommé Fétto sous une averse abondante. Mouhamadou Moustapha Mbacké fut ainsi l’aîné des enfants du Cheikh restés vivants et le frère utérin de Mouhamadou Lamine Bara Mbacké. 

Il entreprit son étude du Coran auprès de son père et dut, après le départ de celui-ci en exil en 1895, continuer ses études avec Serigne Ndame Abdou Rahmane Lô puis avec son oncle Cheikh Ibra Faty jusqu’au retour de Cheikh Ahmadou Bamba du Gabon. Il fut notamment partie des disciples qui rejoignirent le Cheikh à Saout-El-Ma, en Mauritanie, et y demeura avec lui jusqu’en 1907. Il l’accompagna aussi à Thiéyène et ne s’éloigna significativement de son voisinage qu’après le retour définitif de celui-ci à Diourbel en 1912 lorsqu’il reçut l’ordre de fonder à 6 km de Touba le village de Husnu-l Mahâb qui n’était en ce temps qu’un petit hameau de Peulhs transhumants appelé Tindôdi. Il fut en 1921, partie de la compagnie du Cheikh à Dakar lorsque celui-ci y alla répondre à une invitation du Gouverneur Général de l’A.O.F. 

C’est à lui aussi que son père remit sa participation de 500 000 au relèvement du Franc français. Durant toute la période de coexistence avec son père et maître, Cheikh Mouhamadou Moustapha se distingua par un dévouement et une détermination, dans le service qu’il lui consacrait, tels qu’il arriva souvent au Cheikh de mettre publiquement en exergue son engagement et son esprit de sacrifice que tout disciple lui enviait. On ne comptait pas les copies de mémoires du Saint Coran que le fils effectua pour le père ni les tonnages de récolte dont il lui fit don. 

Lors du rappel à DIEU du Serviteur du Prophète, le 19 juillet 1927, Cheikh Mouhamadou Moustapha fit une fois de plus montre de ses vertus de lucidité et de tempérance, après avoir personnellement constaté le décès, en organisant dans une discrétion absolue son inhumation à Touba, selon les vœux du disparu. Après sa désignation le 25 juillet 1927, le premier Calife du assurer la relève en s’attelant particulièrement à la construction de la Mosquée de Touba; projet qui tenait réellement Cheikh Ahmadou Bamba à cœur. Malgré des débuts marqués par des difficultés de tous ordres, dont la plus dure fut assurément l'opposition de nombre de dignitaires de la Communauté à son califat, Cheikh Moustapha s’avéra rapidement être un Calife de grande intelligence soutenue par une vaste culture et une conformité sans faille aux enseignements du Cheikh se traduisant notamment par un courage, une dignité et une générosité qui resteront légendaires. C’est lui qui, à la disparition de leur père, s’était chargé de l’éducation de presque tous ses frères et sœurs. Beaucoup d’entre eux vécurent avec lui et le Calife n’épargna, selon les témoignages de ses frères mêmes, aucun effort pour leur bien-être allant même jusqu’à leur désigner, une fois devenus adultes, leur premier lieu d’installation en ne manquant jamais de leur fournir l’aide matérielle nécessaire aux premiers pas dans la vie. Ce fut également un excellent administrateur, un authentique homme de terrain . En 1928, il obtint l’immatriculation d’un terrain de 400 hectares sis à Touba et demanda, au début de 1929, l’autorisation de reprendre la construction de la Mosquée dont l’irresponsabilité et la cupidité de l’Administrateur Occidental désigné avaient mis les travaux en cause. A l’issue d’un long procès à rebondissements dans les tribunaux parisiens, l’Administrateur Tallerie eut injustement gain de cause et la communauté mouride se vit contrainte de lui payer la somme faramineuse de 250 000 francs comme dommages et intérêts pour dédit et préjudice sur rupture de contrat. D’autres obstacles auxquels le chantier de la Mosquée eut bientôt à faire face furent : l’acheminement du matériel de construction à Touba face à l’inexistence de réseau de communication, la rareté des matériaux tels que la latérite dans cette zone, la profondeur de la nappe phréatique (à plus de 25 m) posant de façon cruciale le problème de l’eau etc. La découverte de la carrière de Ndock, à une dizaine de kilomètres au Sud de Touba, permit de résoudre le problème de la latérite. L’engagement total de dizaine de milliers de volontaires, le dévouement indescriptible de milliers de jeunes, femmes et adultes travaillant plus de 18 heures par jour, transportant dans des paniers posés à même la tête ou sur charrettes d’énormes blocs de pierres sur une dizaine de kilomètres, toute cette formidable énergie déployée dans la sueur et dans le sang (car on ne compta pas alors les décès) accélèrent l’achèvement des fondations et l’empierrement de la plate-forme de la future mosquée.

Pour résoudre le problème des voies de communication Cheikh Mouhamadou Moustapha entreprit, malgré l’incrédulité des autorités publiques, le financement et la réalisation sur fonds propres d’un tronçon d’une cinquantaine de kilomètres de voie ferrée qui allait relier Diourbel à Touba via Mbacké à partir d’un embranchement du Dakar-Niger. Avec toujours la détermination extraordinaire de milliers de disciples, des "Baye Fall" sous le commandement de leur Calife Serigne 4 www.majalis.org Moustapha Fall, fils aîné de Cheikh Ibrahima Fall, la durée de réalisation de cette initiative inédite dans l’histoire pulvérisa toutes les prévisions et fut achevée en un an et quelques mois. Ce succès éclatant accéléra de façon impressionnante l'unité et l'unanimité qui, déjà, faisait jour autour de sa personne façonnant ainsi durablement l'organisation de la Mouridiyah après la disparition du Cheikh. 

Au point de vue économique, l’âme profondément paysanne de Cheikh Moustapha alliée à un esprit d’entreprise et d’organisation élevé permirent à la communauté mouride de produire des résultats agricoles considérables. Ainsi la production arachidière qui était estimée aux environs de 20 000 tonnes au début des années 30 passera en 1937/38 à 75 000 tonnes soit une progression marginale de 275%. Le Chantier confié à la Société des DRAGAGES, il fut officiellement procédé à la pose de la première pierre de la Mosquée le vendredi 4 mars 1932. Mais, malgré la célérité des travaux, les années de peste meurtrière, la récession mondiale des années 30 se jugulant aux perturbations de la seconde guerre ralentirent considérablement leur progression. Et c’est dans ce contexte de profonde crise et de graves difficultés économiques que s’éteignit le vendredi 13 juillet 1945 (3 Sha'bân 1364 H) Cheikh Mouhamadou Moustapha confiant à ses suivants la perpétuation de l'œuvre colossale entreprise pendant plus de 18 ans. Mais s’il reste à jamais vrai que DIEU TRESHAUT ne peut oublier la rétribution de ceux qui combattent "avec leurs biens et leurs personnes" sur Son sentier, Mouhamadou Moustapha aura alors mérité son Agrément et son Election, la Reconnaissance du Prophète de l’ISLAM (PSL) et celle de Khadimou Rassoul. Mieux, tous ceux qui, aujourd’hui, se réclament du Serviteur du Prophète ou toute personne tenant sincèrement au rayonnement de la Parole de DIEU TRES-HAUT  sur terre doit une fière chandelle à ce Digne Socle de l'Edifice de la Foi et de la Vertu…

jeudi 13 octobre 2016

Les Pièges du Bas-Monde selon Serigne Touba

Ces passages sont extraits du recueil « Silkul Jawâhir » (Le Cordon de Joyaux Précieux) écrit par Cheikh A. Bamba durant sa jeunesse. L'ouvrage, dont la première partie, d'où ces extraits sont tirés, traite du Bas-monde et de ses pièges, est une suite de récits hagiographiques, de sentences des Anciens, d'exhortations et de sagesses profondes indispensables à la formation religieuse, morale et spirituelle de tout musulman.

« Ô mon frère en Dieu, sache que le repos [que tu recherches] dans ce monde dure très peu de temps. Et que l'essentiel de ce temps sera troublé par les peines et les épreuves. 

Sache également que ce repos temporaire ici-bas entraînera la perte du repos éternel de l'Au-delà. Repos qui, au contraire de celui-ci, constituera un règne sans fin. Par conséquent, il devrait être aisé pour tout homme intelligent de faire preuve de patience, durant ce bref séjour terrestre, afin d'obtenir, en échange, un repos perpétuel dans l'autre Monde.

Notre maître Al-Ghazali - que Dieu soit satisfait de lui - a maintes fois explicité, à travers un grand nombre d'illustrations, la véritable nature de ce Bas-monde. Il en est ces propos rapportés du Messager de Dieu - la Paix et le Salut soient sur lui - dans lesquels le Prophète nous avertit sur le pouvoir de fascination et d'envoûtement du Bas-monde : 

« Méfiez-vous de ce Bas-monde ! Il est plus aguicheur et plus sournois que [les deux anges tentateurs] Hârût et Mârût. Sa première ruse contre toi consistera à te faire croire qu'il est en ta faveur et le restera pour toujours. Les ferventes assurances qu'il te présentera te menant souvent à croire en sa sincérité. Alors qu'en réalité, il dissimule sa fourberie et n'hésitera nullement à te trahir à la première occasion. Car il te dirigera, progressivement, inexorablement, sans que tu aies le temps de le réaliser, à ta perle éternelle. Le Bas-monde peut être ainsi assimilé à l'ombre qui, bien que te paraissant invariant, s'évanouit pourtant lentement [à l'apparition de la lumière]. Ainsi en est-il de la vie de tout être humain : elle s'écoule lentement, se dissipant à chaque instant. La vie de ce monde, de la sorte, te fait constamment ses adieux, s'enfuyant toujours devant toi, pendant que toi, tu persistes malheureusement dans ta négligence et dans ton inconscience. »

Parmi les astuces que la vie de ce monde utilise pour t'ensorceler, sa manière de t'exprimer son amour infini afin que, toi aussi, tu l'aimes passionnément. Elle te persuadera ainsi de sa fidélité sans faille et te fera croire que, jamais au grand jamais, elle ne te quittera pour un autre. Ce n'est que par la suite qu'elle te révèlera brutalement, sans que tu t'y attendes, sa perfidie et son vrai visage. En devenant soudain ton pire ennemi. A l'instar d'une femme perverse qui, en mante religieuse, trompe tous ses amants, les invite un à un chez elle pour les assassiner sans pitié.

Le Prophète Issa - Paix sur lui - eut, en ce sens, une révélation à travers laquelle le Bas-monde lui fut matérialisé sous la forme d'une vieille femme. Lorsque Seydinâ Issa lui demanda : « Combien d'époux as-tu eu jusqu'ici ? », elle lui répondit : « L'on ne peut les compter, car étant trop nombreux ». Issa - Paix sur lui - de lui demander alors : « Ces époux sont-ils tous morts ou bien t-ont-ils répudiée ? ». Ce à quoi la vieille lui répondit : « Pas du tout ! C'est moi plutôt qui les ai tous assassinés ! » Le Prophète Issa - Paix sur lui - de s'exclamer : « Hélas ! Malheur à ces nombreux sots qui, bien qu'étant témoins de tes crimes odieux sur leurs innombrables prédécesseurs, persistent encore à t'aimer avec passion ! »

Fait également partie du funeste pouvoir de mystification de ce Bas-monde, sa capacité à embellir son apparence extérieure, à travers différents artifices et astuces. Tout en dissimulant soigneusement ses trahisons et ses nombreuses vilénies, sous ses étincelants apparats. Ceci, pour mieux tromper l'ignorant et le séduire par la beauté extérieure qu'il lui manifeste. Il peut ainsi, en cela, être assimilé à une vieille femme, difforme et fort repoussante, qui dissimule son visage disgracieux sous un voile, qui porte de magnifiques habits et se pare d'un maquillage factice afin de charmer ceux qui l'aperçoivent de loin. Le jour où ses malheureux prétendants ôteront son voile et ses faux atours, et qu'ils découvriront tardivement la supercherie, ils regretteront amèrement de l'avoir aimée, du fait de sa laideur sans nom et des hideuses abjections dont elle est entachée...

Il a été ainsi rapporté que le Jour du Jugement Dernier, l'on exposera le Bas-monde sous la forme d'une vieille femme immonde et monstrueuse, l'oeil atone et purulent, le visage revêche, la bouche béante, dévoilant des dents affreuses. Lorsque les humains la verront, ils invoqueront Dieu, en s'interrogeant : « Qui peut bien être cette femme si hideuse ? ». Il leur sera alors répondu : « Cette femme si hideuse est le Bas-monde pour lequel vous vous jalousiez si férocement les uns les autres. Cette femme si dégoutante est le Bas-monde pour lequel vous vous combattiez et vous entretuiez si impitoyablement. Cette femme si affreuse est le Bas-monde pour lequel vous n'hésitiez pas à repousser vos proches et qui vous a leurrés avec ses parures ». Lorsqu'on donnera, par la suite, l'ordre de jeter le Bas-monde en enfer, il s'exclamera alors : « O Seigneur ! Pourquoi m'y jeter toute seule ? Où sont donc mes anciens amants, mes admirateurs et mes compagnons ? ». Il sera alors ordonné de jeter ces derniers, en sa compagnie, dans la Géhenne...

Abû Hurayra - Dieu soit satisfait de lui - a rapporté les propos de l'Envoyé de Dieu - Paix et salut sur lui - où il lui demande : « Ô Abû Hurayra, veux-tu que je te montre [la véritable nature de] ce Bas-monde ? » « Certes oui, ô Envoyé de Dieu ! », répondis-je. Il me prit alors par la main, m'entraina au loin et s'arrêta finalement devant un cloaque fangeux où des crânes humains, provenant de cadavres abandonnés, étaient mélangés à des restes d'os brisés et aux souillures d'excréments. Le Prophète - Paix et salut sur lui - me dit : « O Abu Hurayra ! Observe bien ceci ! Ces crânes humains que tu vois ici étaient exactement, dans le passé, comme les vôtres. C'est-à-dire remplis de désirs, âpres à la thésaurisation des biens de ce Bas-monde. Ces crânes comptaient, comme vous le faites exactement aujourd'hui, sur une longue vie et sur les délices de ce Bas-monde. Aujourd'hui, ils sont devenus d'humbles ossements blanchis, avec leurs corps en état de putréfaction. Ces restes de guenilles que tu vois ici étaient les vêtements fastueux que [ces cranes] portaient lors des cérémonies et des jours de fête. En ce jour, le vent les a jetés et mélangés aux souillures. Ces ossements d'os brisés que tu vois devant toi étaient les montures sur lesquelles ils parcouraient fièrement les quatre coins du monde. Quant à ces excréments que tu vois, c'est tout ce qui reste des aliments délicieux pour lesquels ils s'échinaient, rusaient et que les uns usurpaient aux autres. Aujourd'hui leurs corps, devenus puants et répugnants, ont été jetés ici au loin. Et nul [d'entre leurs anciens compagnons] ne veut plus les approcher, du fait de leur puanteur. Voilà [ô Abu Hurayra] la véritable nature de ce Bas-monde, comme tu le vois ici de tes propres yeux. Quiconque veut pleurer sur ce monde, n'a donc qu'à pleurer. Car c'est ici le lieu et le moment de le pleurer.. ».

Abù Hurayra - Dieu soit satisfait de lui - de terminer : « Tous les hommes qui étaient présents en ce moment-là se mirent alors à pleurer... »

[Traduction originale en français par S. Sam Mbaye (Editions Culture Universelle) reprise et adaptée par Majalis]

vendredi 23 septembre 2016

LES ILLUSIONS DE LA GRANDEUR

Propos de Cheikh A. Ahad Mbacké, troisième Khalife des mourides, sur les illusions de la notabilité et d'un haut rang social ou religieux (en wolof et français) :
« Ak loo bari bari daraja, boo doon dem Aras aka dellusi, te nàttable wu ñu ne lu wóor la yitam, fii rekk la ñu lay neg. Ngir xam ne Aras kenn dëkku fa, di nga dellusi. Te boo dellusee fii de, ak koo mëna doon, boo defee lu bon ñu wax ko, boo fenee ñu weddi ko.
Yàlla na ñu Yàlla saxal cig njub te saxal ñu ci ag wer. Te ñu yëg ne ku bëgga mucc, da ngay nekk cig njub. Ku bëgg lu baax, da ngay nekk ci lu wer. Na ñu góor-góorlu ci ag njub ; mooy sunu ndimbal. Na ñu góor-góorlu ci lu wer ; mooy sunu sag.»
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« Sache que, quels que soient ton rang et ton degré spirituel, [tu ne seras jugé que sur tes actes]. Car, même s'il était avéré, sans aucune sorte de doute, que tu passais toutes les nuits près de la Station Divine. Nous autres simples mortels attendrons patiemment que tu reviennes sur terre, assurés que nul ne peut résider éternellement là-haut. Et si jamais tu reviens sur terre parmi nous, nous n'hésiterons point, quel que soit ton rang, à dénoncer tes dérives ou tes mensonges.
Puisse le Seigneur nous raffermir dans la droiture et dans l’orthodoxie. Sachez que quiconque aspire au salut [ici-bas et dans l’Au-delà] se doit de persévérer dans la droiture. Et quiconque veut obtenir le bien, se doit de persister dans l’orthodoxie et la transparence. Persévérons donc dans le Droit Chemin ; car c’est notre seul gage de bénéficier de l’Assistance de Dieu. Persévérons également dans les actes orthodoxes et transparents ; c’est notre seule garantie d’honorabilité. »
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Vers de Serigne Mbaye Diakhaté, grand poète wolof, sur les illusions de la richesse, de la célébrité ou même de la piété :
« Ndegam da ngaa jëfa jëf yaw mii ba naw li nga jëf
Saytaane jëf na lu kenn dul jëf te mujj na bew
Xam-xam bu rëy, ak alal, ak jaamu Yàlla gu rëy
Ak jagle, ak siiwu tur, yii yepp taxtila raw
Te donte ay kooma kiy mbooloo da fay taxa gën
Xaroona gën ñepp ak Firhawna yewwule ndaw
Xaarona alku na ak koomam mu rëy ma mu yor
Firhawna alku na ak mbooloo mu rëy ma ko ëw »
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Interprétation :
« Si jamais tu t'enorgueillis de la grandeur de tes œuvres, souviens-toi que Satan a œuvré plus que quiconque et finit pourtant dans la disgrâce
Sache donc que ni ta vaste érudition, ni ta prodigieuse richesse ou ta célébrité ne pourront, à elles seules, te sauver
Et que ni tes talents, ni tes compétences ou même tes nombreux actes cultuels ne constituent des garanties suffisantes
S'il était vrai que la richesse était gage d'éminence, le richissime Harûn serait assurément le plus éminent des hommes
S'il était vrai que le nombre de sujets et d'admirateurs était un signe de supériorité, Pharaon serait certainement supérieur à tous
Alors que Harûn, du fait de son orgueil démesuré, fut englouti sous terre, en même temps que son immense fortune
De même, Pharaon, du fait de son insolence, finit par périr, sombrant dans les eaux, entouré de ses nombreux sujets... »