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mercredi 2 septembre 2015

Biographie de MAME CHEIKH ANTA MBACKE « Boroom Gaawaan » (1867-1941)

Qui était Borom Gawane ? Cheikh Sidy Moukhtar MBACKE, communément appelé Mame Cheikh Anta, est né à Porokhane dans la région du Saloum en 1867. Sa mère est Mame Asta Walo MBACKE, plus connue sous le nom de Mame Anta Ndiaye. Son père est le célèbre cadi Serigne Momar Anta Saly, il est le frère cadet de Cheikh Ahmadou Bamba. 

Ses études : Il a appris le Coran auprès des maîtres coraniques célèbres. Le plus connu parmi eux, pour lui avoir enseigné le plus, est Cheikh Abdou Rahmane LO. C’est auprès de son grand frère Serigne Mor Diarra qu’il a étudié les sciences islamiques avant de rejoindre Cheikh Ahmadou Bamba qu’il ne quittera plus jamais. 

Son éducation : Mame Cheikh Anta voyait en son frère Cheikh Ahmadou Bamba un homme de Dieu, un guide spirituel qui perfectionne, à courte durée, l’état de ses compagnons et améliore leurs actes. Il n’avait pas hésité à se soumettre à ses ordres. Il lui vouait une obéissance totale et cherchait à chaque instant à lui satisfaire. Il a été parmi les premiers à recevoir l’éducation du Cheikh et sa formation. Celui-ci accordait une attention particulière à la formation de son disciple et frère ; il le préparait aux tâches importantes qu’il devra assumer par la suite en faveur du mouvement mouride et des fidèles. Faisant preuve d’une parfaite disposition à recevoir cette formation, Mame Cheikh Anta était devenu l’un des hommes de confiance du Cheikh et l’un de ses conseillers les plus proches, leurs correspondances en constituent une parfaite illustration. Mame Cheikh Anta, personnalité multidimentionnelle A l’instar de tous les grands hommes du Mouridisme formés par le Cheikh, Borom Gawane était un éducateur spirituel ayant sous sa direction plusieurs daara où ses disciples exerçaient comme activité secondaire une agriculture de grande envergure. Cependant il ne se contentait pas de cette activité traditionnelle qui ne satisfaisait pas ses grandes et nobles ambitions pour plusieurs raisons. D’abord, il y avait devant lui ce mouvement naissant dirigé par son frère et guide qui était confronté à d’énormes difficultés et entouré de menaces de la part des ennemis de l’Islam. Les disciples subissaient de graves atrocités. A cela s’ajoutaient les nécessités de la vie quotidienne et les recommandations de l’Islam qui font de l’aide aux nécessiteux une obligation. Mame Cheikh Anta ne pouvait pas avoir la conscience tranquille devant cette situation préoccupante qui nécessitait, pour l’atténuer ou pour s’en sortir, l’assurance d’une autonomie financière. Après avoir bien analysé la situation, il s’était lancé dans le domaine de l’investissement ; il importait et tissait de vastes relations commerciales avec les grands financiers de son époque. Il devient ainsi l’un des plus importants hommes d’affaires du pays. Il possédait des biens fonds, d’un parc automobile impressionnant et de plusieurs magasins. Il a été même considéré en 1919 l’homme le plus riche du pays. Mais avec une générosité légendaire, Mame Cheikh Anta consacrait tous ses biens au service des musulmans, en général, et des Mourides en particulier comme nous le verrons plus bas. 

Mame Cheikh Anta et la vie politique : Il s’intéressait à la vie politique du pays. Il observait ses importantes mutations en suivant de très près les informations. Il cherchait même à avoir une certaine influence sur cette politique en soutenant l’un des acteurs en compétition afin de sauvegarder l’intérêt général et celui des musulmans. C’est ainsi qu’il avait porté son soutien à la candidature de Ngalandou DIOUF à la députation au parlement français. 

Sa déportation à Ségou (Mali) : Cette attitude de Mame Cheikh Anta dans ces élections lui avait valu la colère de Blaise Diagne, l’adversaire de Ngalandou. Après avoir fomenté de fausses accusations, Blaise avait donné l’ordre de l’interner jusqu’à Ségou de 1929 jusqu’en 1935. Dans une déclaration, Serigne Mbacké BOUSSO a défendu la position de Mame Cheikh Anta en prouvant sa bonne foi et son innocence et en démontrant que son accusation n’était, en fait, qu’une machination sans aucun fondement de vérité. En réalité, cette déclaration était davantage un soutien moral et une dénonciation de cet acte odieux qu’une simple preuve d’innocence de Mame Cheikh Anta. Elle illustre bien aussi la profondeur des relations des deux hommes. 

Ses actions et ses réalisations : Boroom Gaawaan avait consacré toute sa vie aux œuvres profitables à l’ensemble des musulmans, à la contribution à la prospérité de la communauté mouride et au soulagement des souffrances des fidèles. 

Ayant comme slogan ce verset du Saint Coran « Tout ce que vous dépensez dans la bonne cause, Dieu le saura », Mame Cheikh Anta avait toujours fait preuve d’une générosité légendaire dans les moments difficiles.

Ses réalisations sont ainsi innombrables. Toutefois, nous tenons à en citer quelques-unes à titre d’exemples sans entrer dans les détails. Lors d’une grave sécheresse, il avait distribué aux sinistrés une quantité de riz estimée à 125.000 tonnes. Il prenait en charge et sauvegardait les infrastructures de la communauté musulmane contre les oppresseurs et les agresseurs. Il soutenait les petits commerçants en leur accordant beaucoup de facilités sur le plan financier. Au compte de son maître, il s’acquittait de certaines obligations familiales et offrait des dons et des cadeaux aux oulémas et aux chefs religieux.

Il distribuait de nombreux cadeaux aussi bien aux proches du Cheikh qu’aux autres chefs religieux afin de solliciter leurs prières en faveur des musulmans durement affectés par la déportation du Cheikh. Il intervenait beaucoup auprès des autorités coloniales, tantôt pour recueillir des informations concernant son frère et maître, tantôt pour demander le retour de celui-ci à son pays. Il a aménagé des routes à Diourbel pour faciliter l’accès des visiteurs à la résidence du Cheikh. Il a été le premier à faire imprimer un recueil de poèmes composés par Cheikh Ahmadou Bamba. Il a réalisé l’un des vœux les plus chers à Cheikh Ahmadou Bamba en finançant un pèlerinage qu’il a effectué en compagne de Serigne Mbacké BOUSSO et de Serigne Fallou.


Son pèlerinage : Mame Cheikh Anta était accompagné à ce mémorable voyage aux Lieux Saints d’éminentes personnalités parmi lesquelles Cheikh Mouhammad al-Fâdil (Serigne Fallou), Cheikh Mbacké BOUSSO, Serigne Moulaye fils de Serigne Mbacké BOUSSO et son propre fils Serigne Tacko. Les péripéties de ce voyage sont racontées dans un beau récit écrit par Cheikh Mouhammad al-Fâdil lui-même. 

Ses relations : Boroom Gaawaan entretenait d’excellentes relations aussi bien avec le Cheikh et ses proches qu’avec les autres. Les profondes et exceptionnelles relations spirituelles qui le liaient à son frères et maître depuis sa tendre enfance se sont renforcées au fil des années. Quant à ses liens avec ses proches et les autres figures du Mouridisme, ils étaient bien connus : il jouissait du respect et de l’amitié de tous sans exception aucune. Toutefois, l’amitié qui lie liait à Serigne Mbacké BOUSSO et à Cheikh Mouhammad al-Fâdil était singulière. Profondément touchés par la déportation de Boroom Gaawaan à Ségou (Mali), chacun lui avait témoigné de son soutien ; l’un par écrit et l’autre par une visite qu’il lui a rendue à Ségou et lors de laquelle il lui a prédit la fin des épreuves et son retour imminent à son pays. Par ailleurs, Mame Cheikh Anta avait tissé de vastes et bonnes relations avec le monde extérieur en raison de ses activités commerciales. En somme, il ne s’agit ici que d’un aperçu de la vie de cette grande figure du Mouridisme, cette personnalité multidimensionnelle dont l’œuvre témoigne d’une ferme et sincère détermination, d’une vision extraordinaire et d’un dévouement inégalable au service du Cheikh, de ses disciples et de l’ensemble des musulmans. L’importance et la portée de ses positions nous rappellent en effet le troisième Khalife de l’Islam Sayyidinâ ‘Uthmân ibn ‘Affân –que Dieu l’agrée et ses largesses. Le fait que le Cheikh lui a confié Darou Salam, son premier village, et lui a réservé l’honneur de sa réception à son retour de l’exil au Gabon illustre parfaitement de sa confiance et son estime pour son frère et disciple Cheikh Anta. Boroom Gaawaan a été rappelé à Dieu le 1er janvier 1941 à Darou Salam où se trouve son mausolée. Que Dieu puisse l’agréer et bénir les actes de ses successeurs ! Amen ! 

Par Khadim MBACKE Cheikhou

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