Le 21 septembre 1895, le fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké priait sur l’océan Atlantique. C'est durant la période coloniale que Serigne Touba fut arrêté et déporté au Gabon. C’est à Diewol plus exactement que va commencer le long et glorieux périple de «Khadimou Rasssoul» (Ndlr : Le Serviteur du Prophète Mouhammad Psl).
A l’époque, la hargne anti-islamique du colonisateur avait atténué l’engouement et relégué en pratique clandestine tout acte de dévotion, dont les cinq prières obligatoires. Mais Bamba, englouti par une piété ininterrompue, fait un scandale légendaire en s’adonnant, dès son arrivée dans la grande salle du gouvernorat de Saint-Louis du Sénégal, à la prière de deux «Rakkas». Un comportement qui heurte au plus haut point les membres du Conseil privé, voyant en cette démarche une déclaration d’hostilité. Il est arrêté le 10 août 1895 par un détachement de l’armée coloniale française et incarcéré dans la prison de Saint-Louis.
Il sera détenu dans la cellule n°12. Après 25 jours de détention, c'est-à-dire dans la journée du 5 septembre 1895, le Cheikh sera traduit devant le Conseil privé, siégeant au Palais du gouverneur de Saint-Louis. Et la sentence tomba. Par Procès verbal n°1, délibération n°16, il est décidé de la déportation du Cheikh au Gabon. Le conseil, composé essentiellement d’administrateurs français, décida à l’unanimité des 10 juges de déporter Serigne Touba dans cette colonie d’Afrique centrale, en lui allouant ainsi une pension d’un montant de 50 francs.
Le 18 septembre 1895, la déportation du «Marabout Ahmadou Bamba» est confirmée par une lettre du Commissaire général du gouvernement français au Gabon. Cette notification, en application de la décision prise en Conseil privé, réuni à Saint-Louis par le gouverneur deux semaines auparavant, fait ressortir l’accusation portée sur le «Serviteur du Prophète» (Psl) en ces termes : «Ses agissements et ceux de ses talibés menacent de troubler la tranquillité du bas Sénégal».
Le 21 septembre, Serigne Touba quitta le Sénégal à bord d’un navire dénommé «Ville de Pernambouc», en direction du Gabon. Il y restera, durant 7 années et 7 mois. Mais sur la route de la longue déportation, le fondateur de la confrérie mouride effectua des miracles. Et l’un des plus connus est, sans nul doute, la prière effectuée en pleine mer. A l’approche de la prière de «Takussan», en cette journée du 21 septembre 1895, Serigne Touba a voulu accomplir ses obligations religieuses. Mais c’était sans compter sur l'opposition du Blanc qui lui interdit de prier dans le navire.
«Ils m’ont jeté sur la mer par refus de la volonté divine et par haine. Mais le Généreux m’y a incontestablement comblé de sa grâce», a écrit le Cheikh par la suite. Et d’ajouter : «Ils ont voulu m’humilier en me jetant sur la mer, heureusement que mon Seigneur a dompté pour moi la plus houleuse des mers».
Après ses 7 années d’exil à Mayombé, au Gabon, Cheikh Ahmadou Bamba sera de retour au Sénégal à bord du bateau dénommé «Ville de Macéao», le 11 novembre 1902.
118 après les mourides se souviennent toujours
Le départ de Cheikh Ahmadou Bamba vers le Gabon marque un tournant dans l’histoire du mouridisme. Ainsi, chaque année depuis cette date, les fidèles talibés organisent une journée de commémoration. Plus d'un siècle après ce haut fait, les mourides se souviennent chaque année de cette prière faite par Serigne Touba dans l’océan Atlantique. Elle est commémorée sur la plage de Diamalaye.
C’est là une façon pour eux de se rappeler cette séquence historique extrêmement importante dans l’accomplissement de la destinée de Cheikh Ahmadou Bamba. Et au-delà de la commémoration, il est question de montrer à la face du monde que la prière que le Cheikh a effectuée en mer ce jour-là, sur la route de son exil au Gabon, sort de l’ordinaire. Une façon aussi pour les mourides de «renouveler leur gratitude au Miséricordieux d’avoir fait d’eux des disciples de Cheikh Al Khadim». Et surtout de «propager l’œuvre de Serigne Touba, lui qui n’était venu sur terre que pour vivifier la parole du Tout-Puissant».
Ibrahima SALL
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire